Le transport ferroviaire est un des socles de développement que les pays africains devraient inévitablement explorer pour accélérer leur croissance économique dans les prochaines années. Depuis quelques années, un certain nombre d'entre eux ont commencé modestement à relancer leur développement économique dans le secteur du transport ferroviaire, et ce à la fois pour le transport de passagers et dans le domaine du fret ferroviaire. Dans cet article, je vous présente une comparaison de deux modèles de transport ferroviaire développés dans deux pays africains, à savoir l'Éthiopie et le Sénégal.
L'Éthiopie est le deuxième pays le plus peuplé d'Afrique, derrière le Nigéria. Sa capitale, Addis-Abeba, est l’une des capitales les plus peuplées d’Afrique. Ce pays de l'Afrique de l'Est, sans aucun accès à la mer, a une économie fortement dépendante de l'importation de produits de consommation. Ces importations transitent à près de 90 % par le port de Djibouti, son voisin. Ces dernières années, les autorités éthiopiennes, en collaboration avec celles de Djibouti, ont investi dans une nouvelle ligne électrifiée de chemin de fer, longue de 750km, qui relie la capitale, Addis-Abeba, au terminal de Doraleh à Djibouti, desservant une vingtaine de gares.
Ce projet est financé à 70 % par le gouvernement chinois dans le cadre de ses grandes ambitions de reconstruire les nouvelles routes de la soie. La Chine a construit cette ligne de chemin de fer et en garantit l'exploitation sur une durée d'un peu plus de six ans, tout en assurant un transfert de compétences aux locaux éthiopiens, qui devraient à terme assurer entièrement l'exploitation de cette ligne. Cette ligne de chemin de fer permet à l'Éthiopie d'assurer le transport de passagers entre plusieurs grandes villes du pays, d'Addis-Abeba à Dire Dawa en 10 heures, contre 2 jours avec l'ancienne ligne vieille de plus de 100 ans et qui avait été construit par les français. Arrivé à Dire Dawa, le train repart vers le terminal de Doraleh à Djibouti pour charger plus de 106 conteneurs qui seront acheminés au port sec de Mojo avant d'être redistribués à l'intérieur du pays. Cette nouvelle stratégie permet de soulager les usagers de la route grâce à un train confortable et efficace, mais aussi de réduire le temps de trajet et le nombre de camions de transport de marchandises, estimé à environ 1 500 par jour, causant une usure accélérée des infrastructures routières et des embouteillages, notamment aux frontières. L'Éthiopie, dont les importations de produits dépendent fortement du port de Djibouti, a choisi cette stratégie de transport ferroviaire, qui va fortement booster son économie dans les prochaines années, compte tenu de sa forte croissance démographique, qui avoisinerait 200 millions d’habitants d’ici 2050.
Quant au Sénégal, pays de l’Afrique de l’Ouest, qui compte presque 18 millions d’habitants, il a misé sur un projet ferroviaire concentré sur le transport urbain de passagers pour désengorger sa capitale, Dakar. La presqu’île de Dakar est aujourd’hui l’une des villes les plus denses d’Afrique, abritant la moitié de la population urbaine du pays. Dakar a fortement besoin d’une politique de transport de masse pouvant soulager le calvaire des bouchons interminables pendant les heures de pointe. Le gouvernement du Sénégal a investi, avec ses partenaires (Agence Française de Développement, la Banque africaine de développement, etc.), dans une ligne de chemin de fer longue de 36 km, reliant le centre-ville historique de Dakar à la nouvelle ville numérique de Diamniadio, en passant par plusieurs quartiers de la banlieue dakaroise. À terme, la deuxième phase du TER de Dakar devrait atteindre le nouvel Aéroport International Blaise Diagne de Diass, pour un total de 55 km de tronçon. Cette ligne de train, bimodale diesel et électrique, permet de transporter plus de 60 000 voyageurs par jour et contribue fortement à améliorer le cadre de vie des habitants de l’ancienne capitale de l'AOF.
Les perspectives d’une troisième phase du projet seraient déjà à l’étude, avec un prolongement de la ligne jusqu’à Mbour et Thiès, les reliant respectivement à l’AIBD et à Diamniadio, pour un maillage complet de la grande agglomération du Grand Dakar (Dakar-Mbour-Thiès). En plus de cette ligne de transport urbain, le Sénégal a aussi, à l’instar de l’Éthiopie, relancé la reconstruction de sa ligne de chemin de fer Thiès – Tambacounda, ville située à l’Est du pays. Cette ligne, autrefois destinée exclusivement aux transports de passagers et de marchandises entre Dakar et Bamako, peine à être ressuscitée malgré plusieurs tentatives de relance qui se sont soldées par des échecs. L’aboutissement de ce projet permettrait de redynamiser l’activité économique sur l’axe Dakar-Tambacounda, avec la construction du nouveau port minéralier et vraquier de Bargny-Sendou, du port en eaux profondes de Ndayanne mais surtout du port sec à conteneurs de Tambacounda, qui pourrait devenir un hub logistique entre le Sénégal, le Mali, et toute la sous-région.
Ces deux pays africains, différents culturellement et démographiquement, ont choisi des politiques ferroviaires distinctes, avec des partenaires économiques en concurrence sur le plan de leur politique étrangère en Afrique : la Chine et la France. Dans tous les cas, il sera inévitable pour ces pays d’aborder leur développement économique en investissant davantage dans les infrastructures, notamment dans le secteur du transport de masse pour les voyageurs, mais aussi du fret ferroviaire. Avec l’accord de la ZLECA (Zone de libre-échange continentale africaine), l'amélioration des infrastructures ferroviaires pourrait jouer un rôle clé dans l'intégration économique continentale.
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